Friedrich NIETZSCHE. Le livre du philosophe. Études théorétiques. Trad., intro. & notes par A. KREMER-MARIETTI. P : FG Flammarion, 1998.
(Quelques commentaires sur Petits Bouts de Nietzsche Un et Deux.)
I — Le dernier philosophe. Considérations sur le conflit de l'art et de la connaissance. (1872)
"L'instinct de la connaissance sans discernement est semblable à l'instinct sexuel aveugle — signe de bassesse !" (20 ; 40)
"Le philosophe et l'artiste parlent des secrets de métier de la nature." (24 ; 42)
"Le philosophe en tant que frein de la roue du temps." (ibid.)
"L'histoire et les sciences de la nature furent nécessaires contre le Moyen Âge : le savoir contre la croyance. Contre le savoir nous dirigeons maintenant l'art : retour à la vie ! Maîtrise de l'instinct de connaissance ! Renforcement des instincts moraux et esthétiques ! " (43 ; 51)
"La bonté et la pitié sont heureusement indépendantes du dépérissement et de la réussite d'une religion : par contre les bonnes actions sont bien déterminées par des impératifs religieux. La majeure partie des bonnes actions conformes au devoir n'a aucune valeur éthique, mais est obtenue par contrainte.
La moralité pratique souffrira beaucoup de la chute d'une religion. Il semble que la métaphysique de la récompense et de la punition soit indisensable.
Si l'on pouvait créer les mœurs, des mœurs puissantes ! Avec elles on aurait aussi la moralité." (45 ; 52)
dans les instincts se montre une "unité dominante" = "Volonté" (46 ; 52)
"Tout ce qui représente un réel effort de vérité est venu au monde par le combat pour une conviction sacrée : par le pathos du combattre : autrement l'homme n'a aucun intérêt pour l'origine logique." (49 ; 53-54)
"Nous ne vivons que grâce à des illusions — notre conscience effleure la surface." (50 ; 55)
"le philosophe reconnaît le langage de la nature et dit : "Nous avons besoin de l'art" et "il ne nous faut qu'une partie du savoir"." (51 ; 55)
"L'art repose sur l'imprecision de la vue." (54 ; 57)
"Penser, c'est un discerner. / La pensée consciente n'est qu'un choix parmi des représentations." (63 ; 62)
"Il existe une double force artiste : celle qui produit les images et celle qui les choisit." (64 ; 62)
"Là où l'on ne peut rien savoir de vrai, le mensonge est permis." (70 ; 66)
sensation —> opération de raisonnement —> sentiment de causalité —conscience, donc moins vieille que la mémoire, comme essence de la sensation : "sensation et mémoire sont dans l'essence des choses" (97 ; 77), "à l'essence de la matière. [...] La logique tout entière se résout donc dans la nature en système de plaisir et de déplaisir." (98 ; 77) = "lois éternelles de la nature" (ibid.).
"La faculté principale me semble être de percevoir la forme, me semble reposer sur un miroir. L'espace et le temps ne sont que des choses mesurées, mesurées sur un rythme." (107 ; 80-81)
"Tout art repose sur le miroir de l'œil." (112 ; 81)
"L'humanité a dans la connaissance un beau moyen un périr." (125 ; 86)
"Je tiens faux de parler d'un but inconscient de l'humanité. Elle n'est pas un tout comme une fourmilière. Peut-être peut-on parler du but inconscient d'une cité, d'un peuple : mais quel sens cela a-t-il de parler du but inconscient de toutes les fourmilières de la terre ?" (135 ; 88)
"Chez Socrate la véracité entre en possession de la logique : elle remarque l'infinie difficulté de dénommer justement." (143 ; 93)
"Le fait de connaître est seulement le fait de travailler sur les métaphores les plus agrées, c'est donc une façon d'imiter qui n'est plus sentie comme imitation. Il ne peut donc naturellement pas pénétrer dans le royaume de la vérité." (149 ; 95)
"A strictement parler, le fait de connaître a la seule forme de la tautologie et est vide. Toute connaissance qui nous fait avancer est une manière d'identifier le non-identique et le semblable, c'est-à-dire est essentiellement illogique." (150 ; 96)
"essence de la définition" : "un solide déterminé ets égal à tant et tant de relations" ; conséquences de l'essence : jugement synthétique. —> il y a métonymie : fausse équation. Confusion choses et concepts des choses. Illogique, "non-savoir" & "faux-savoir". (152 ; 97-98)
"A ceux qui ne veulent ressentir qu'une satisfaction d'érudit, je n'ai pas rendu la chose facile [...]. Les citations manquent." (161 ; 101)
II — Le philosophe comme médecin de la civilisation (1873)
III — Introduction théorétique sur la vérité et le mensonge au sens extra-moral (1873)
"En tant
"En tant qu'il est un moyen de conservation pour l'individu, l'intellect développe ses forces principales dans la dissimulation ; celle-ci est en effet le moyen par lequel les individus les plus faibles, les moins robustes, subsistent en tant que ceux à qui il est refusé de mener une lutte pour l'existence avec des cornes ou avec la mâchoire aiguë d'une bête de proie. Chez l'homme cet art de la dissimulation atteint son sommet : l'illusion, la flatterie, le mensonge et la tromperie, les commérages, les airs d'importance, le lustre d'emprunt, le port du masque, le voile de la convention, la comédie pour les autres et pour soi-même, bref le cirque perpétuel de la flatterie pour une flambée de vanité, y sont tellement la règle et la loi que presque rien n'est plus inconcevable que l'avènement d'un honnête et pur instinct de vérité parmi les hommes. Ils sont profondément plongés dans les illusions et les songes, leur œil ne fait que glisser à la surface des choses, il y voit des "formes", leur sensation ne conduit nulle part à la vérité, elle se contente seulement de recevoir des excitations et de jouer comme sur un clavier sur le dos des choses." (1 ; 118)
"Comme l'abeille travaille en même temps à construite les cellules et à remplir ces cellules de miel, ainsi la science travaille sans cesse à ce grand colombarium des concepts, au sépulcre des intuittions, et construit toujours de nouveaux et de plus hauts étages, elle façonne, nettoie, rénove les vieilles cellules, elle s'efforce surtout d'emplir ce colombage surélevé jusqu'au monstrueux et d'y ranger le monde empirique tout entier, c'est-à-dire le monde anthropomorphique." (2 ; 129)
"Il faut ici admirer l'homme pour ce qu'il est un puissant génie de l'architecture qui réussit à ériger, sur des fondements mouvants et en quelque sorte sur l'eau courante, un dôme conceptuel infiniment compliqué" (& ; 125)
"entre deux sphères absolument différentes, comme le sujet et l'objet, il n'y a pas de causalité, pas d'exactitude, pas d'expression, mais tout au plus un rapport esthétique, je veux dire une transposition insinuante, une traduction balbutiante dans une langue tout à fait étrangère" (1 ; 127)
"Comme l'abeille travaille en même temps à construite les cellules et à remplir ces cellules de miel, ainsi la science travaille sans cesse à ce grand colombarium des concepts, au sépulcre des intuittions, et construit toujours de nouveaux et de plus hauts étages, elle façonne, nettoie, rénove les vieilles cellules, elle s'efforce surtout d'emplir ce colombage surélevé jusqu'au monstrueux et d'y ranger le monde empirique tout entier, c'est-à-dire le monde anthropomorphique." (2 ; 129)
savant / homme d'action : "instinct qui pousse à former des métaphores" — cherche nv domaine pr activité & autre "lit d'écoulement" — ds mythe & art — proche du rêve — Grecs. (2 ; 129-130) — dissimulation (131) libération. Guidé non par concepts mais intuitions. Homme rationnel / homme intuitif (Grec). Immédiateté de l'illusion. (132)
"A la question : est-il permis de sacrifier l'humanité à une folie, on devrait répondre non. Mais pratiquement cela arrive, parce que le fait de croire à la vérité est précisément une folie." (177 ; 135)
Scepticisme comme "point de vue proprement ascétique de la pensée", bannit la foi. Mais foi en la logique (177 ; 136) & en la vie. Eudémonie.
Logique = "esclavage dans les liens du langage" (136).
3 puissances illogiques : amour, religion, art (137).
Il n'est pas d'instinct de la connaissance de la vérité ; seulement instinct de la croyance à la vérité. (180 ; 137)
Art comme mensonge ? mais "traite de l'apparence en tant qu'apparence : il ne veut donc pas tromper, il est vrai." (184 ; 139)
"Tous les instincts liés au plaisir et au déplaisir — il ne peut y avoir un instinct de vérité, c'est-à-dire d'une vérité complètement sans suites, pure, sans émotion ; car là s'arrêterait plaisir et déplaisir et il n'y a pas d'instinct qui ne pressente pas une joie dans la satisfaction. La joie de penser ne démontre pas un désir de vérité." (181 ; 138)
"Seul celui qui pourrait considérer le monde tout entier comme apparence serait en état de l'envisager sans désir et sans instinct : l'artiste et le philosophe. [...] / Tant qu'on recherche la vérité dans le monde, on se tient sous la domination de l'instinct : mais celui-ci veut le plaisir et non la vérité, il veut la croyance à la vérité, c'est-à-dire les effets de plaisir de cette croyance. / Le monde comme apparence — le saint, l'artiste, le philosophe." (184 ; 139)
"Platon comme prisonnier, proposé sur un marché d'esclaves — pour quel emploi les hommes peuvent-ils vouloir le philosophe ? — Cela fait deviner pour quel usage ils veulent la vérité." (186 ; 140)
IV — La science et la sagesse en conflit (1875)
Science (avant habitude & instinct) apparaît : 1) si si dieux méconsidérés ; avantage de connaître qqch plus solidement, 2) égoïsme pousse individu (professionnel comme navigation) à chercher intérêt au moyen de la science, 3) qqch pr gens distingués oisifs, comme curiosité, 4) dans va-vient des opinions du peuple, individu cherche fondement pluus ferme. (188 ; 143)
Sagesse se montre dans : 1) généralisation illogique & hâte de sauter aux dernières conclusions, 2) rapport de ces résultats à la vie, 3) importance absolue donnée à l'âme, 1 seule chose urgente. (188 ; 143)
Socratisme = 1) sagesse car prend âme au sérieux, 2) science car crainte & haine de la généralisation illogique, 3) 1 singularité car exigence dans conduite consciente & logiquement correcte ; nuit à science & et vie éthique. (188 ; 144)
"Socrate, simple aveu de ma part, m'est si proche que je suis en perpétuel conflit avec lui." (188 ; 144)
"Même l'indépendance n'est qu'apparente : chacun finit toujours par se rattacher à ses prédécesseurs. Phantasme après Phantasme. Il est bizarre de tout prendre si sérieusement. Toute la philosophie la plus ancienne est comme un étrangelabyrinthe que parcourt la raison. Il faut adopter un style de rêve ou de conte." (189 ; 145)
Grecs : civilisation produit ses propres correctifs (philosophes). (192 ; 147)
"Comment cette époque s'éteint-elle ? D'une façon peu naturelle. Où se trouvent les germes de la corruption ? / LA fuite des meilleurs à l'écart du monde fut un grand malheur. A partir de Socrate : l'individu se prit trop au sérieux tout d'un coup. / La peste s'y ajouta, pour Athènes. / Ensuite on alla à l'abîme par les guerres contre les Perses. Le danger fut trop grand et la victoire trop extraordinaire. La mort du grand lyrisme et de la philosophie." (192 ; 146-147)
Présocratiques dénués de "l'infâme prétention au bonheur" (193 ; 147), comme c'est le cas à partir de Socrate.
"Socrate, le nouveau dithyrambe, la nouvelle tragédie, l'invention du rhéteur !" (193 ; 148)
"Comment faut-il comprendre le combat de Platon contre la rhétorique ? Il envie son influence." (193 ; 148)
"Le réformateur manqué est Empédocle ; après son échec il ne restait plus que Socrate." (194 ; 149)
"[l]a plus grande perte que l'humanité puisse subir, c'est l'avortement des types de vie supérieurs." (194 ; 149)
"Les hommes doivent apprendre à vivre avec beaucoup plus de prudence." (199 ; 157)
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