mercredi 4 mars 2009

ROUSSEAU : Discours sur l'origine et les fondemens de l'inégalité parmi les hommes.



Jean-Jacques ROUSSEAU, Œuvres..., T. 9, Discours sur l'origine et les fondemens de l'inégalité parmi les hommes. Paris : Bossange, 1791.


"J'aurais voulu vivre et mourir libre, c'est-à-dire, tellement soumis aux loix, que ni moi ni personne n'en pût secouer l'honorable joug ; ce joug salutaire et doux, que les têtes les plus fières portent d'autant plus docilement, qu'elles sont faites pour n'en porter aucun autre." (Dédicace ; 42-43)

"Car il en est de la liberté comme de ces aliments solides et succulens, ou de ces vins généreux, propres à nourrir et fortifier les tempéraments robustes qui en ont l'habitude, mais qui accablent, ruinent et enivrent les foibles et délicats qui n'y sont point faits." (Dédicace ; 44)

"et vous n'avez plus besoin, pour devenir parfaitement heureux, que de savoir vous contenter de l'être." (Dédicace ; 53-54)

"quelque penchant qu'on ait vers le vice, il est difficile qu'une éducation dont le cœur se mêle, reste perdue pour toujours." (Dédicace ; 61)

"Qu'une jeunesse dissolue aille chercher ailleurs des plaisirs faciles et de longs repentirs." (Dédicace ; 68)

L'on ne trouve plus en l'homme "que le difforme contraste de la passion qui croit raisonner, et de l'entendement en délire." (Préface, 72)

"former des conjectures tirées de la seule nature de l'homme et des êtres qui l'environnent, sur ce qu'auroit pu devenir le genre humain s'il fut resté abandonné à lui-même." (Discours... ; 91)

"Mécontent de ton état présent, par des raisons qui annoncent à ta postérité malheureuse de plus grands mécontentements encore, peut-être voudrois-tu rétrograder ; et ce sentiment doit faire l'éloge de tes premiers aïeux, la critique de tes contemporains, et l'effroi de ceux qui auront le malheur de vivre après toi." (92)

"Il en est ainsi de l'homme même : en devenant sociable et esclave, il devient foible, craintif, rampant, et sa manière de vivre molle et effeminée, achève d'énerver à la fois sa force et son courage." (I ; 105)

C'est sa "perfectibilité" qui "le rend à la longue le tyran de lui-même et de la nature." (I ; 111)

Agriculture = le moins lucratif de tous les arts, car prix doit être proportionnel aux facultés des plus pauvres. Arts : lucratifs inversement à leur utilité ; arts les plus néessaires seront négligés. (I, note 9 ; 243).

"Plus les capitales frappent d'admiration les yeux stupides du peuple, plus il faudroit gémir de voir les campagnes abandonnées, les terres en friche, & les grands chemins inondés de malheureux citoyens devenus mendiants ou voleurs, & destinés à finir un jour leur misère sur la roue ou sur un fumier." (I, note 9 ; 244)

"toutes ces grandes choses, savoir, les arts, les sciences et les loix, ont été très-sagement inventées par les hommes, comme une peste salutaire pour prévenir l'excessive multiplication de l'espèce, de peur que ce monde, qui nous est destiné, ne devint à la fin trop petit pour ses habitants." (I, note 9 ; 245)

"Les particuliers ont beau aller et venir, il semble que la philosophie ne voyage point : aussi celle de chaque peuple est-elle peu propre pour un autre." (I, note 10 ; 256)

"Pour prêcher utilement l'Evangile, il ne faut que du zèle, et Dieu donne le reste ; mais pour étudier les hommes, il faut des talens que Dieu ne s'engage à donner à personne, et qui ne sont pas toujours le partage des saints." (I, note 10 ; 257)

"cette espèce de mémoire pour laquelle un individu donne la préférence à un individu pour l'acte de la génération, exige [...] plus de progrès et de corruption dan l'entendement humain, qu'on ne lui en peut supposer dans l'état d'animalité dont il s'agit ici." (I, note 12 ; 268)

"Le premier langage de l'homme, le langage le plus universel, le plus énergique et le seul, dont il eut besoin avant qu'il fallût persuader des hommes assemblés, est le cri de la nature." (I ; 122-123)

"les abstractions sont des opérations pénibles et peu naturelles." (I ; 125)

"Toute idée générale est purement intellectuelle ; pour peu que l'imagination s'en mêle, l'idée devient aussitôt particulière." (ex. : arbre, triangle) (I ; 126)

"Je demande si jamais on a ouï dire qu'un sauvage en liberté ait seulement songé à se plaindre de la vie et à se donner la mort ? Qu'on juge donc avec moins d'orgueil, de quel côté est la véritable misère." (I ; 131)

"le pur mouvement de la nature, antérieur à toute réflexion" = "force de la pitié naturelle". (I ; 137)
"de cette seule qualité découlent toutes les vertus sociales" : générosité, clémence, humanité, bienveillance, amitié : pitié appliquée aux faibles, coupables, à l'espèce humaine, à un objet particulier (I ; 138).

"Amour de soi" = naturel, au contraire de "amour propre", création de la raison, fortifiée par la rélfexion, qui "replie l'homme sur lui-même". (I ; 139)

"la pitié est un sentiment naturel, qui, modérant dans chaque individu l'activité de l'amour de soi-même, concourt à la conservation mutuelle de toute espèce." (I ; 140)

"le moral de l'amour est un sentiment factice, né de l'usage de la société, et célébré par les femmes avec beaucoup d'habileté et de soin pour établir leur empire, et rendre dominant le sexe qui devroit obéir." (I ; 143)

"le devoir d'une éternelle fidélité ne sert qu'à faire des adultères, et [...] les loix même de la continence et de l'honneur étendent nécessairement la débauche et multiplient les avortements." (I ; 147)

"Le premier qui ayant enclos un terrain, s'avisa de dire, ceci est à moi, et trouva des gens assez simple pour le croire, fut le vrai créateur de la société civile." (II ; 155)

"de libre et indépendant qu'étoit auparavant l'homme, le voilà par une multitude de nouveaux besoins assujetti, pour ainsi dire, à toute la nature, et surtout à ses semblables, dont il devient l'esclave en un sens, même en devenant leur maître." (II ; 178)

"la société et [les] loix [...] donnèrent de nouvelles entraves au faible et de nouvelles forces aux riches, détruisirent sans retour la liberté naturelle, fixèrent pour jamais la loi de la propriété et de l'inégalité, d'une adroite usurpation firent un droit irrévocable, et pour le profit de quelques ambitieux, assujettirent désormais tout le genre humain au travail, à la servitude et à la misère." (II ; 185)

"ce n'est pas à des esclaves qu'il appartient de raisonner de liberté." (II ; 194)

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