mercredi 9 février 2011

Textes courts : Fréquentations

FRÉQUENTATIONS.


Il fait un temps magnifique aujourd’hui.

Demain, cela fera trois semaines que je n’aurai vu personne.

Il est vrai qu’ils sont tous occupés par leur travail quotidien. À cela il faut ajouter le temps qu’absorbent inévitablement les transports en commun — une à quatre heures par jour, certifie-t-on.

Ils sont tous mariés, ou souhaireraient l’être. Les enfants seront bientôt là. Il est des priorités qui ne sont point des contraintes, et d’autres qui nous sont si vitales qu’elles nous sont naturelles.

La joie même fatigue les corps : le repos est nécessaire. Il est plus ou moins grand, chez l’un, chez l’autre.

Leurs amis ne sont pas forcément les miens. J’en connais même qu’ils gardent jalousement — par peur de les perdre, très certainement.

On ressent aussi par moment le besoin d’être un peu seul — non d’ailleurs que ce soit le lot de tous.

Je comprends qu’à l’ordinaire ils n’aient le temps de me voir, et qu’ils profitent pour ce faire des soirs où par mégarde ils sont seuls, où ils s’ennuient un peu.

Une pensée pourtant m’amuse au milieu de mon désert : combien de temps faudrait-il — un mois, deux ? — faudrait-il à quelqu'un pour découvrir mon corps, si d’aventure ce couteau qui coupe les pages de mes livres perçait aussi mon cœur.

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