dimanche 26 avril 2009

N (2004), chapitre septième.

Chapitre septième,
Où N reçoit une autre visite,
Moins charmante que la précédente,
Et part en mission.


Pfff… Sacré bout de femme — ou de ne sais-je quoi d’autre, se dit N, et de se servir à nouveau du café. Il faut que je retrouve Dmitriu.
Et, bien évidemment, au moment même où N achevait cette pensée, la sonnette retentit. Allons bon. Je me disais aussi… Il se leva pour ouvrir.

« — Mr Jean, quelle surprise. Joli chapeau de western.
— Hé hé, c’est d’époque, garçon ! Tu vois ces trous ? (Il se découvrit le chef et pointa les dits manques.) C’est des flèches d’Indiens ! (Il remit le chapeau sur sa clavitie partielle.) Comment va l’petit jeune ?
— Ça va, ça va. Vous entrez ?
— Hin hin, j’suis pas là pour camper d’vant la porte, garçon.
— Allez hop. (N referma la porte derrière le cow-boy.) Un peu de café ?
— Avec plaisir, p’tit.
— Je suis plus grand que vous. Mais asseyez-vous donc. Qu’est-ce qui vous amène ?
— Eh bien, gars, toi et moi, on va renverser un régime !
— Pourquoi ? Le bison a l’air de vous réussir.
— Hin, hin, hin. Non, non, pas ce régime-là, gamin ! Un vrai régime, avec un vrai gouvernement populaire, qu’on va remplacer, d’un p’tit coup d’pouce, par un vrai dictateur avec la moustache et tout !
— Par un dictateur ?
— Bah, c’est plus marrant, non ? Ça amuse ma Dame, les petits dictateurs du Grand Nord.
— Votre Dame ? Jeanette ?
— Ouais, c’est un de ses p’tits noms.
— Un bizarre bout de femme. Mais chouette.
— Ah mon gars, t’y frotte pas : ça pique !
— Je sais, je sais.
— Non non non, tu sais rien du tout, c’est moi qui t’le dis. Une sacrée vipère quand elle veut, c’est moi qui t’le dis — mais j’l’ai pas dit, on s’comprend !
— Ne vous faites pas prier…
— Oh ça mon gars, elle dira c’qu’elle veut bien t’dire ! J’vais m’faire tirer les oreilles sinon ! Allez hop ! (fit-il en avalant d’un trait ce qui lui restait de café.) On décolle !
— Là tout de suite ?
— Eh ouais : j’ai pas qu’ça à faire, garçon ! Allez hop !
— Une seconde : je me change.
— Pas besoin, kid, pas besoin. »

N sentit lors une vague de chaleur l’envahir. Et à raison, car il était à présent couvert, en place du kimono qu’il portait lors, d’une épaisse pelisse et de bottes en conséquence et prévision, supposait-il, du climat peu favorable qui devait être celui de leur destination.

« — Pratique, très pratique, ces petits tours, fit N visiblement ravi.
— Vas-y, garçon, tiens-toi à moi, et ne me lâche pas : on y va.
— C’est instantané ?
— Oh, au moins ça dure pas très longtemps, ça non ! Allez, pose ta main sur mon épaule. Et pas d’messes un peu trop basses, hein ? Hin hin hin, c’est parti ! »

N s’exécuta, en se demandant tout de même ce qui d’aventure se passerait s’il lui prenait l’idée de lâcher le conducteur durant le trajet. Ils s’évaporèrent tous deux dans un « Pouf ! » sulfureux et sonore.

*

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