mercredi 29 décembre 2010

Textes courts : Ames

ÂMES.


Toute chose a une âme, et celle-ci est à l’image de celle-là.
Il en est de même pour les hommes.

Sous le vernis des crèmes et lotions, se trouve l’âme à fleur de peau, laquelle épouse celle-ci d’une parfaite manière. On taille son âme en taillant sa barbe ou ses ongles de pied, en s’épilant les sourcils, en gagnant un bonnet de soutien-gorge, en perdant un bras ou un œil, en prenant du ventre, des fesses ou des cuisses.

C’est pourquoi rien de cela ne doit être fait inconsidérément : notre être s’en ressent. La volonté taille l’âme, comme le jardinier taille avec soin et science un arbre miniature.

De plus, on croit communément que nos pensées inouïes, nos paroles dites à part, nos actes irremarqués ou de certains insus, ne nous touchent que modérément.

On croit également que nos choses publiques nous affectent plus que nos choses secrètes. C’est vrai, pour une part, car le regard et le jugement des autres ne sauraient laisser en nous aucune trace : ils peuvent tuer ou nous rendre meilleurs.

Toutefois, penser, dire et agir taillent l’âme tout autant, car ce sont les manifestations, volatiles plus ou moins, de nos volitions. Celles-là façonnent notre âme plus profondément encor, car elles altèrent le corps à même le corps : nos pensées, paroles et actes laissent maintes cicatrices sur notre visage, nos mains, et toutes parts. Certaines de ces cicatrices sont belles comme le jour ; d’autres sont d’une laideur repoussante.

Partout je ne vois que des enfants verts ou noirs, incolores même, naïfs, retors, ou fermés par la préoccupation, vils et méchants parfois. Nulle part encore je n’ai rencontré de belle âme à laquelle j’eusse voulu me lier.

Aucun commentaire:

© Nicolas Codron / all rights reserved